Échecs connexes

(ex-solidaires)

 

Bonjour (bonsoir) à tous.

Voici une variante d’échecs féeriques – nouvelle, espérons-le : les échecs « solidaires ».

À tout moment dans la partie en effet, il faut que toutes les cases occupées par chaque camp soient solidaires entre elles. Une case est solidaire d’une autre si elle la touche par un côté ou un sommet.

 

Au début d’une partie chaque camp remplit la condition de solidarité, bien sûr :

 

 

Mais on voit immédiatement que Blanc ne peut entamer la partie par e2-e4, car ce pion ne serait plus solidaire de l’ensemble des autres pièces de son camp :

 

 

Une ouverture par Cb1-c3, en revanche, est possible :

 

 

Remarquons encore que, dans la position ci-dessous, Blanc, au 2e coup, ne peut pas jouer b2-b4 :

 

 

Certes, le pion b4 semble solidaire de toutes les autres pièces blanches, mais en réalité non : par son avancée il a mis hors-jeu les pièces de la colonne « a », la tour et le pion (comme illustré ci-dessous) !

 

 

Aucune pièce, ou groupe de pièce ne peut en effet être séparé des autres – jamais. Un tel état « disjoint » des forces d’un camp signifie la perte instantanée de la partie pour ce dernier. Blanc et Noir ont donc une manière supplémentaire de gagner la partie : couper les lignes ennemies ! Le diagramme ci-dessous permet à Noir, au trait, de gagner immédiatement :

 

 

En effet, le coup Cc6xd4 isole le Fou blanc c4 des autres pièces blanches et termine la partie.

Notez encore que le coup Noir e5xd4, ci-dessus, isole aussi le Fou blanc ; mais il est interdit à Noir car le pion e5 ne peut jouer sur une case qui ne serait pas solidaire des autres cases de son camp.

 

Je ne sais pas si la variante « solidaire » est agréable à jouer – je n’ai pas encore essayé. En revanche je suis sûr qu’elle permettra de créer quelques problèmes d’échecs intéressants. Essayez par exemple de faire collaborer Noir et Blanc pour que Blanc aille à promotion le plus vite possible. J’ai une solution en 12 coups (ici) – ferez-vous mieux ?

 

Je vais explorer le genre « rétro » avec cette contrainte – il doit y avoir de jolies choses à trouver...

à+

É.

[19 déc. 2012]

 

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[21 déc. 2012]

 

P.S.

Suite à la publication de cette variante sur deux forums (France-échecs et Retros Corner), je me suis rendu compte que les choses n’étaient pas aussi simples. La phrase : « Un tel état disjoint des forces d’un camp signifie la perte instantanée de la partie pour ce dernier ; Blanc et Noir ont donc une manière supplémentaire de gagner la partie : couper les lignes ennemies »... n’est pas satisfaisante. Il faut mieux définir ce que seraient un « échec » aux ÉS et une position « illégale ». Une solution serait de dire que dans le dernier diagramme (reproduit ci-dessous), le coup noir Cc6xd4 met le camp blanc en échec : si blanc est incapable de parer cet échec, Blanc a perdu la partie. Pour ce qui est de la position en question, Blanc ne pourrait parer l’échec qu’en reculant son Fou (en c3, par exemple, ou en d3, e2, f1), en avançant le pion c2 en c3, en jouant Cb1-c3 ou Dame d1-d3. Impossible en revanche pour Blanc de capturer le Cavalier noir en d4 – car une telle capture (par la Dame ou le pion e3) disjoindrait le camp blanc. Or, aux ÉS, on ne peut jamais disjoindre ses forces volontairement (ni mettre son Roi en échec, comme aux échecs orthodoxes). Je réfléchis encore – mais cette rustine-là me paraît de bon aloi, non ?

 

 

 

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[26 déc. 2012]

 

Sur proposition de Nicolas Dupont, cette variante est rebaptisée « Échecs connexes » (Connected Chess en anglais). La « rustine » ci-dessus étant adoptée, les règles suivantes deviennent définitives :

 

1) Les ÉC obéissent aux règles traditionnelles des échecs orthodoxes ;

2) Les ÉC obéissent en plus à la règle de la « connexion » : toutes les cases sur lesquelles sont placées les pièces d’un camp doivent être connectées entre elles ; deux cases sont connectées si elles se touchent par un côté ou un sommet au moins ;

3) Aux ÉC il y a une manière supplémentaire de se mettre en « auto-échec » : en désobéissant à la règle de la connexion. C’est interdit : il faut, à tout moment, que la position d’un camp soit connectée ;

4) Aux ÉC il y a une manière supplémentaire de mettre le camp adverse en « échec » : en coupant ses lignes ;

5) Aux ÉC on pare un échec qui coupe les lignes en jouant un coup qui reconnecte l’ensemble des pièces ;

6) Aux ÉC il y a une manière supplémentaire de perdre la partie : être dans l’incapacité de parer l’échec qui coupe les lignes.

 

Pour les compositeurs de problèmes que séduiraient les ÉC, on voit qu’une position illégale est une position qui a été obtenue sur l’échiquier, au départ de la position orthodoxe, en enfreignant une ou plusieurs des règles ci-dessus.

 

Merci à tous les contributeurs, tant de France-échecs que du Retros Corner.